Le 14 mars, le groupe des randonneurs du mardi s’est retrouvé devant la piscine des Gayeulles pour une randonnée à la journée à Lamballe, organisée en deux temps de découverte séparés par une pause déjeuner au restaurant : les environs de Lamballe le matin, la ville elle-même présentée par une jeune femme guide l’après-midi.
Dès notre arrivée nous découvrons le plan d’eau de la ville-Gaudu que nous contournons le long de sa rive sud avant de la quitter pour goûter le charme de quelques chemins creux. Nous ne sommes pas très loin de la mer et le paysage devient très vite de la lande bretonne. De nombreux trous d’eau, voire des mares — on parle d’ailleurs du « Pays des mille mares » —, témoignent du passé potier de la région : en effet, l’eau noie, temporairement ou toute l’année, les « caves » d’extraction d’une argile particulière de très grande qualité, exploitée par les potiers jusqu’aux années 1930. Autre richesse de la lande, les ajoncs et la bruyère qui alimentaient leurs fours de cuisson. Ces landes de la Poterie sont répertoriées aujourd’hui site Natura 2000 en tant que « Zone Spéciale de Conservation » tant de la flore que de la faune.
Nous quittons ce paysage pour une futaie traversée de ruisseaux aisément franchis par de petits ponts de bois. Sous un ciel breton pommelé, nous arrivons bientôt au château de la Moglais dont le parc à la française abrite quelques statues. Malheureusement, ce château du début du XVIIIe n’est ouvert au public que pendant l’été, d’où son air d’abandon.
Nous regagnons Lamballe par la rive nord du plan d’eau de la ville Gaudu avant d’emprunter le chemin des Lavoirs le long du Gouessant : il existe plus de 90 lavoirs des XVIIIe et XIXe siècles dont certains ont été utilisés non pas comme buanderies mais comme mini-tanneries. Dans ce pays d’élevage où, de plus, le bois ne manquait pas, une industrie du cuir a perduré jusqu’au milieu du XXe siècle. Lamballe fabriquait notamment un parchemin de très grande qualité réputé jusqu’à Rome. L’arrivée du plastique et les nuisances liées au tannage — odeurs et eaux souillées — ont eu raison de cette activité.
Nous apprécions tous le moment détente-déjeuner chez La Mère Rondel où notre guide vient nous retrouver pour une déambulation dans cette ville qui continue à s’inscrire dans l’histoire.
Lamballe n’est plus Lamballe ! Depuis le 1er janvier 2019, fusionnée avec les communes de Morieux et de Planguenoual, — elle l’était déjà avec Meslin — elle est devenue Lamballe-Armor et compte une population d’un peu plus de 18 000 habitants. Elle bénéficie de dix kilomètres d’un littoral longé par un chemin des douaniers qui ne peut que tenter les randonneurs ! Elle appartient aussi à la communauté d’agglomération « Lamballe terre & mer » qui regroupe 38 communes au nombre desquelles Pléneuf-Val-André, Erquy, Moncontour… soit 70 000 habitants.
Après cette brève introduction, notre guide nous invite à la suivre dans la montée vers la Collégiale. Elle nous fait remarquer les tuiles faîtières et les épis de faîtage, réalisations des potiers lamballais dont l’un, soldat au temps de Louis XV pendant la Guerre de Sept Ans aurait créé le « Frédéric », représentation caricaturale d’un Frédéric de Prusse très grand montant un cheval très petit. J’avoue n’avoir repéré aucun « Frédéric » sur les toits… mais un coq, très beau !, ce qui n’est pas si mal.
Nous passons devant la maison natale de Mathurin Méheut et arrivons à l’esplanade du château, dépourvue de château ! Construit, rasé une première fois, reconstruit et sauvegardé au gré des nombreux conflits qu’a connus la Bretagne du XIIe au XVIe siècle – ducs de Bretagne opposés aux Avaugour, comtes de Penthièvre et vassaux rebelles, guerre de Succession de Bretagne, risques d’invasion par les Espagnols depuis le sud… —, ce château disparut à tout jamais en 1626 sur ordre de Louis XIII.
La Collégiale, Notre-Dame de la toute-puissance, simple chapelle du château à l’origine, est progressivement agrandie, intégrée dans l’enceinte du château et dotée de fortifications, mais ne devient accessible aux fidèles que pendant les périodes de paix. Aussi une deuxième église, lieu de culte lors des conflits, est-elle édifiée pour eux à l’extérieur des défenses. Soulignons que l’église d’origine ne devient Collégiale qu’au XVe siècle lorsque le duc de Bretagne Jean V y crée un « collège » de six chanoines qui doivent assurer de façon permanente tous les offices.
Faute d’entretien, la Collégiale se dégrade progressivement et ce n’est qu’au milieu du XIXe siècle que des travaux de réhabilitation sont réalisés et qu’un mur de soutènement surmonté de créneaux vient consolider le soubassement rocheux fragilisé. Elle est inscrite au patrimoine des monuments historiques en 1862.
À notre grand regret, en dépit des efforts des un.e.s et des autres pour faire tourner la clé, nous n’avons pas pu ouvrir la porte ni voir les nombreux vitraux, les uns sauvegardés, les autres restaurés selon un mode « classique » ou plus contemporains et sujets à polémiques et violences. Créés par Geneviève Asse et Olivier Debré, ils n’illustrent en effet aucune scène biblique, mais ce sont leurs variations de couleurs, bleues pour l’une, jaunes pour l’autre, qui doivent inviter à une méditation dont certain.e.s doutent du caractère religieux.
Nous descendons ensuite vers la vieille ville et ses maisons à pans de bois : notre guide nous fait remarquer que les pièces de bois constituant la charpente des façades étaient numérotées comme peuvent l’être aujourd’hui les pierres d’un édifice à construire ou d’un espace à daller. La Maison du Bourreau, magnifiquement restaurée avec ses colombages « sang-de-boeuf », abrite le musée Mathurin Méheut. Pour l’anecdote sachez qu’aucun bourreau ne l’a jamais habitée, mais une famille Bourceau… et c’est un journaliste qui, au début du XXe siècle, aurait trouvé plus « vendeur » de lui attribuer ce nom !
Nous continuons notre parcours vers le champ de foire et les haras que nous ne visitons pas mais dont nous apprenons qu’ils sont aujourd’hui loués à des professionnels du cheval pour des entraînements et des compétitions.
Après la Collégiale et les maisons à colombages, nous voici devant une tout autre architecture, la mairie de Lamballe-Armor constituée d’un premier bâtiment classique augmenté d’une réalisation contemporaine qui utilise de façon originale une ressource très répandue en Bretagne : le granite. Devant la mairie une fontaine dont les chevaux rappellent la vocation équestre de la ville.
Alors que nous rejoignons ensuite le car qui nous attend près de la gare, nous nous étonnons de la forme arrondie des fenêtres des maisons bourgeoises implantées parallèlement à la voie ferrée : l’imposition d’une taxe sur les ouvertures — portes et fenêtres — incitait évidemment les propriétaires à en diminuer les dimensions en adoptant ces arrondis ; autre mesure d’économie, des portes basses ouvrant sur deux ou trois marches descendantes préservant ainsi la hauteur sous plafond.
Nous aurions dû venir en train — Lamballe, de tout temps carrefour de voies terrestres, bénéficie du train depuis 1863 — mais le risque de grève aidant, nous avons opté pour un transport en car plus fiable dans la perspective d’un retour à Rennes sans encombre.
Pour nombre d’entre nous Lamballe-Armor et son histoire ont été une découverte et tous, nous remercions chaleureusement l’équipe d’animation pour l’organisation originale de cette journée.
Plus d'informations sur les randonnées du mardi... (utlrennes.fr)
Une des « Françoise » de la rando du mardi